lundi 31 décembre 2007

Le poisson de jade et l'épingle au phenix

Collection Folio 2€

ATTENTION NE PAS FAIRE LIRE A UN ENFANT MÊME SI C'EST UN CONTE !!!

Voici un petit conte chinois anonyme du XVIIe siècle bien sympatique. C'est un texte picaresque et érotique, libertin et poétique. Lu en une fois (80 p.), il nous offre l'histoire truculente d'un jeune étudiant et d'une fille de bonne famille qui vont, en rêve, se rencontrer, se promettre en mariage et s'échanger un gage de fidélité...

Le lendemain matin au reveil, le jeune homme aperçoit sur son coussin l'épingle de phénix, et la jeune fille un poisson de jade échangé pendant le rêve. Pensant être soutenus par les dieux et les ancêtres et aidés par la suivante de la jeune fille, les deux "amoureux" (et la suivante) vont se voir, se revoir, aussi peu chastement que faire se peut! S'ensuit une série d'aventures dignes d'un conte voltairien...

Entre conte voltairien et marivaudage, mêlant truculence rabelaisienne et érotisme, entrelaçant des passages d'un grand raffinement à d'autres très crus, ce petit conte, qui a tout pour choquer notre morale judéo-chrétienne si on en avait encore, n'a pas plus de prétention que de nous faire sourire.

Malgré toutes ces péripéties, à la fin, comme pour tout bon conte, la morale est rétablie, morale que je vais vous livrer, car elle ne dévoile rien de l'histoire:

Que dans les brumes d'un songe s'unissent les corps et se mêlent les âmes, qu'un phénix d'or prenne son vol divin et qu'un poisson de jade jaillisse de l'onde afin que mari et femme faits pour une union d'un siècle se trouvent en harmonie dès la première rencontre, n'est-ce pas là la marque de la convergence des volontés du Ciel? (...) Si les génération futures veillent à appliquer la règle "Porter son soin à bien agir, Se garder bien de s'avilir", ils sont assurés que les vertus dont ils feront preuve seront génératrices d'un immense bonheur !

Tout un programme!

La chambre rouge : Ranpo Edogawa

«Flânerie au bord du fleuve Edo», telle est la traduction littérale des idéogrammes utilisés pour composer ce nom de Edogawa Ranpo (anagramme de Edgar Allan Poe), plus connu au Japon comme le maître fondateur de la littérature policière japonaise.

Dans ce recueil, cinq nouvelles nous parlant de crimes: Un homme mutilé aux prises avec les perversions de sa femme, une "chaise humaine" prodiguant caresses et sueurs froides à ses victimes, des confessions criminelles dans une "chambre rouge", une intrigue machiavélique autour d'une "pièce de deux sen"...

On retrouvera dans ces cinq récits - les plus célèbres d'Edogawa - la même atmosphère pesante ou sinistre, le même goût pour les mises en scène fantastiques et obsessionnelles, la même esthétique du crime.

Lorsqu'on en commence une, il est impossible de reposer le livre avant sa fin... il s'ensuit cinq minutes de vides, pour faire le point, pour ce demander si c'est bien fini, si on est de retour dans la vraie vie... pour réaliser...

Un auteur à découvrir absolument!

Le réfectoire un soir et une piscine sous la pluie : Yôko Ogawa

Voici deux courtes nouvelles de Yôko Ogawa publiées chez Acte Sud / Babel : Le réfectoire un soir et une piscine sous la pluie suivi d'un thé qui ne refroidit pas.

Le réfectoire un soir et une piscine sous la pluie:

Quelque temps avant son mariage, une jeune femme rencontre un enfant et son père, qu'elle retrouve un soir plongés dans la contemplation d'un restaurant scolaire. Quand l'homme lui raconte pourquoi l'image d'un réfectoire le soir évoque pour lui le souvenir d'une piscine sous la pluie, la mélancolie s'installe tel un lien dont elle ne pourra plus se défaire...

Un thé qui ne refroidit pas:

Une jeune femme apprend la mort d'un camarade. Elle le connaissait peu mais cet accident la trouble plus qu'elle ne l'aurait imaginé. Dans l'ambiance étrange de la cérémonie funèbre, elle rencontre quelqu'un qui va faire basculer son quotidien. Attirés par l'autre, ils partent à la découverte des mystères de l'amour et de la mort aussi sereinement qu'ils se servent une tasse de thé.

Avec finesse et subtilité, Yoko Ogawa effleure l'inconscient de personnages vivant des instants précieux, comme hors du temps, qui bouleversent leur existence. Ces deux nouvelles sont reliées par une même sensation mélancolie et de douceur cruelle suscitées par une écriture magnifique, simple et épurée. Une atmosphère floue de pluie et de brume qui nous fait vivre deux rencontres étranges et qui s'installe durablement dans notre esprit...

Seul bémol, la fin trop abrupte de chaque nouvelle...

Tsubaki : Aki Shimazaki

Traduction du titre : Camélia

Acte Sud / Babel, 2005


Tsubaki signifie camelia en japonais et c'était la fleure préférée de Yukiko. Avant de mourir, elle désire libérer sa conscience d'un lourd secret et écrit à sa fille une lettre dans laquelle elle raconte comment elle a empoisonné son père le jour même où la bombe allait tomber dans son quartier à Nagazaki.

C'est l'histoire d'un amour impossible et d'un secret pesant qui fera exploser une famille en même temps que la seconde bombe atomique anéantira son pays.

C'est un véritable coup de coeur : un roman très fort, un récit simple, épuré, plein d'émotion, parlant d'un drame familial sans tomber dans le cynisme ou le pathétique, avec cette atmosphère particulière que l'on ne retrouve que dans la littérature japonaise.

Tsubaki est le premier volet d'une pentalogie dont il me tarde de décourvir la suite.

Pour d'autres critiques élogieuses, voyez les avis de Loutarwen, de Jules, de Papillon, de Laure, de Lhisbei et de Frisette.

Livres... me revoilà!

Après trois ans d'absence - ma plus grande pause littéraire - j'ai retouvé le chemin de ma bibliothèque et des librairies il y a quelques mois. J'ai réouvert un livre et j'ai fait cap sur des contrées alors inexplorées : Allemagne, Chine, Japon, L'Archipel d'Orsenna... J'ai commencé un tour du monde...

Comme beaucoup de monde autour de moi, je vais essayer de vous faire part de mes carnets de "voyages que l'on fait de chez soi", bien calé dans son fauteuil, à côté d'une théière fumante d'un thé vert revigorant.

Alors, si vous le voulez avec moi, larguez les amarres, cap à l'Est... direction le pays où se lève le soleil!