mardi 8 janvier 2008

Hôtel Iris : Yôko Ogawa

Dans une station balnéaire, Mari, une adolescente de 17 ans vit et travaille avec sa mère, propriétaire tyrannique et dominatrice d'un hôtel miteux, l'Hôtel Iris. Un soir, le calme des lieux est troublé par des éclats de voix : une femme sort de sa chambre en insultant le vieillard élégant et distingué qui l'accompagne, l'accusant des pires déviances. Fascinée homme beaucoup plus âgé qu'elle, au passé et à la réputation troubles (assassinat, pratique sexuelles douteuses...), elle le retrouve quelques jours plus tard, le suit et lui offre bientôt son innocente et dangereuse beauté...
Une vraie relation de domination va se créer entre le vieil homme et Mari: une éducation sentimentale crue, froide et horrible.

Sous l'écriture pudique, pour ne pas dire réservée, de l'auteur se dissimule une violence rare. Violence de la relation amoureuse ici poussée à ses extrêmes... Dans ce récit particulièrement subjectif et dérangeant, tout est perçu à travers les yeux de la jeune adolescente, ou plutôt à travers ses réflexions à posteriori sur cette liaison contre-nature, ce qui fait du livre un véritable hymne au sadomasochisme, à l'amour et à la douleur, sans regrets, comme si la jeune fille ne voyait toujours pas en quoi cette relation était anormale, honteuse, perverse, choquante et même dangereuse.

Mais Hôtel Iris n’est pas juste un roman autour d’un rapport paraphilique, l’écriture lumineuse de Yôko Ogawa transporte le récit au-delà des marges de la vulgarité et du graveleux. Les descriptions des jeux entre les deux protagonistes sont limités au stricte nécessaire pour semer le trouble. Au contraire, l’auteur a pris le parti de faire jour sur la personnalité troublante et ambivalente de la jeune Mari. Ainsi, cette étonnante histoire d’amour, de désir et de mort entraîne le lecteur dans les tréfonds du malaise dont Yôko Ogawa est sans conteste l’une des adeptes les plus douées.

Anecdote : Dans le livre , tout rapport au Japon a été effacé (à part deux références qui sont sûrement des maladresses de traduction), on se retrouve hors du temps dans un décor de carton-pâte qui pourrait bien être n'importe quelle station balnéaire au monde, lui conférant un statut d'universalité... Mais en fait, c'est à la suite d'un voyage à Saint-Malo où l'auteur s'était rendue pour un festival littéraire que le roman a été écrit, s'inspirant librement des lieux qu'elle avait visité. Alors, ne peut-on pas se demander si au final, l'histoire ne se déroule-t-elle pas en France?

Pour d'autres critiques, voir : Loutarwen, Yueyin et le blog de Japantime.

4 commentaires:

Loutarwen a dit…

Ce roman m'a profondément marqué. Un vrai gros coup de coeur...

Soïwatter a dit…

C'est sûr que ça marque! Mais qu'attendre de plus de Yôko Ogawa!

Thracinee a dit…

Si "Hôtel Iris" est teinté de sadomasochisme, j'ai trouvé que "L'Annulaire" se rapproche du fétichisme.

Soïwatter a dit…

Le fétichisme après le sadomasochisme... Ogawa serait-elle grande prêtresses des paraphilies?
L'annulaire est déjà dans ma LAL (qui grandit un peu trop vite depuis quelques semaines)